Texte lu aux Jeudis de l’Oulipo, 2004.

Hervé Le Tellier

Où l’on découvre que le poète, en toute circonstance, et sur toute distance, peut composer des haïkus.

Parfois je compose

Des haikus de métro

C’est vraiment très court

 

Le premi-er vers

se compose sur le quai

En comptant mes doigts

 

Le deuxième vers

se compose évidemment

quand le métro roule

 

Pour le dernier vers

Bien sûr, je dois redescendre

Zut. La ram’ s’en va.

 

Mon regard s’égare

Sur un’ fill’ nue de la pub

Je suis comm’ toutl’mond’

 

« Je vais vous chanter

Un’ chanson de mon pays ».

Je baisse les yeux.

 

Le SDF dit :

« Je vais passer parmi vous. »

Je regarde ailleurs.

 

Sans domicile fixe

Pas de domicil’ du tout

Formule trompeuse.

 

Odeur effroyable

Un mendiant qui vient d’entrer

Je change de rame ?

 

Tiens, voilà Jacqu’ Jouet !

Le poète de métro,

il a d’l’espac’, lui.

 

Je descends plus tôt

Trop de syllabes à ma station

C’est vraiment dommage

 

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