Tifs courts, chapeau en poils de lapin roux, pull-over d’acrylique marron, tissu noir, fade, sur camisole rouge tartignolle, sac cuir coupe Tati, jeans gris, troué, à motifs cul-cul, calecif long et slip kangourou, paire de mocassins usagés (pourris !) made in Yougoslavie, Ulrich Von Der Bar, gugus pas trop discret, fait ses courses, pif mûr, à Monoprix. Eau d’Evian ? d’Ourcq ? Plutôt vin : Beaujolais, Préfontaine…
Surgit alors, venu de loin, du rayon charcuterie, Luc Voltaire, quidam mono-tâche, flic du commun, habile, qui chope la main du Von Der Bar et – clic ! – boucle – clac ! – l’outil curatif : menottes au poing !
Là, retour imposé à un hiver froid du passé. Un Champion, rayon fruits et agrumes, soir.
– Abruti ! ose Laurent Fignon.
– Gros nul ! fait en écho Ulrich.
– Pachydermus ! glapit Lolo, tas putride !
– Sartoris ! hurle Ulrich.
– Homme sans qualités ! sort Laurent, noir.
Un combat de Titans : Ulrich Von Der Bar, styliste pur, soiffard brut, contre Laurent Fignon, as du vélo vif.
Et pim ! Pam ! Poum ! Ça cogne, rugit, ça bricole dur !
Chaos d’univers !
Mais comme su, ira furor brevis est. Donc, Laurent fait un tour : le bras droit d’Ulrich est torsadé, tordu.
– Aïe ! sort Ulrich… Malade, oui !?!
Fignon en abuse :
– On a subi ? On veut la fin ?
– Té ! Tu vas voir ! répond Ulrich, acide.
Boum ! La bastos d’Ulrich perce Fignon au cœur. Il vacille, plat, foutu.
– Voilà le résultat ! dit Von Der Bar.
– …suis occis… avoue Laurent, rôti.
Ulrich Von Der Bar une fois capturé, ma foi, Luc Voltaire, lui, amorce l’ascension ultime : clôt Paul-Charles Rioux à Héricourt, détruit Olaf Krigg à Meudon, prend Louisa Guerino à Perpignan, mouche Mario Fumatto, trucide Ingmar Boulez à Brives (ou Tulle), assombrit Hector Mulat, dit « Mulet », à Chinon, sauve Noir (Michel) d’un gros attentat in Lyon, hurle, un soir, à un concert d’Isabel Boulais en Avignon, mure un casino à Berck-sur-Loire, bondit au dancing de Bourges (intra-muros), joue Schmitt au Latino Teatro de Thuir, copie aussi Douste-Blazy à Lourdes, lit Duras, Nodier, Montaigne, Sullitzer, au bord de l’Adour pilote un taxi (ça s’dit !), loue un pédalo, picole au bistrot « l’Amérique » : ricard, ouzo, suze, raki, whisky, rouge, blanc, grignote un sandwich jambon-beurre-corniflard, cuit, mate un combat de mi-lourds sur la six, pose un regard torride sur Miss Garonne, voit rugbyman nommé Marius fondre sur sa miche, amortit l’uppercut soit, mais pas le choc du tabouret : il s’évanouit.
Plus tard, en son lit, Luc agonise. Oui, c’était mortel…
Dans l’ultime tournant, il souffle bas : « fuite… hop là ! »