i
je vois ce nouveau chemin qui part
m’échappant à l’œil et au doigt
ne sachant où fixer une demeure
dégageant on dirait de mon corps
la ferme volonté qui au cœur m’entre
me liant mains et pieds
je ne sais ce que je deviens
perdu dans un tel trou
où l’artifice des vers
ne peut ni langue la briser ni ongle
j’attends donc que ça se passe
aussi réactif qu’un légume
sur l’espace vierge du texte humain
ou bien qu’une pierre
de médisant qui perd à mal dire son âme
racontant le tout comme à sa tante
jusqu’au fond de son contenu
jusqu’au bord du récipient
tout en évitant les méandres de la prose
n’osant le battre de rameau ni de verge
le tout bouillant comme de la lave
d’un apparent mariage
dans lequel on se croit sa propre mère
où je ne reconnais ni sœur ni frère
sinon en fraude là où j’ai nul oncle
dans le temps géologique du monde
perdu quelque part dans la ville
où je ne traine plus je cours
pour retisser un par un les fils
je jouirai de ma joie en verger ou chambre
regardant la lumière jouer seule sur le jardin
et ma solitude ce soir dans le fauteuil du salon
ii
prenons une autre fois et un autre salon
un autre gâteau de rêves une autre part
une autre vue sur un autre jardin
un autre œil qui regarde jouer un autre doigt
quand je me souviens de la chambre
derrière la porte haute de notre demeure
où droit devant jouerait notre fils
corps fait de notre désir de nos corps
là juste là comme séchant un cours
où pour mon mal je sais que nul homme n’entre
dans un quartier nouveau d’une nouvelle ville
le mirage d’un adulte sur ses pieds
dans le temps géologique du monde
je vois parmi les ombres l’être que je deviens
mais tous me sont pires que frère ou qu’oncle
sortis on dirait tous du même trou
jusqu’au moindre oncle ou frère
tous allant en plus vers
la même fin en partant de la même mère
tous mes membres jusqu’à l’ongle
font partie de ce même mariage
qui met son anneau regarde le temps qui passe
de pas aussi décidé que de la lave
une sorte d’amour qui pousse comme un légume
ainsi que fait l’enfant devant la verge
sur l’espace vierge du texte humain
comme la logodiarrhée de la prose
deux squelettes sous une seule pierre
mais chacun quand même ayant son propre récipient
tant j’ai peur de n’être assez sien dans mon âme
manquant d’esprit manquant de contenu
laissés sur le chemin de la vie comme une vieille tante
iii
imaginons donc un moment une bonne vieille tante
qui prend dignement du thé dans son salon
et qui s’arrête un instant pour examiner son contenu
avant que sa voix ne prenne ce nouveau départ
ah que je sois rien dans le corps non dans l’âme
elle sent ensuite ses pieds qui frôlent son jardin
dans sa tête ses émotions changent de récipient
elle ressent cette transformation sous chaque doigt
pour qu’elle se sente plus jeune qu’une pierre
et qu’elle m’accueille en secret dans sa chambre
oui dans les secrets autofictionnels de la prose
où rien de vraiment intime ne demeure
sur l’espace vierge du texte humain
le fait que de cet amour n’aura jamais ni sens ni fils
plus me blesse le cœur que coup de verge
au plus profond des cellules de son corps
pousse un cancer comme les racines d’un légume
donnant le plus libre cours
à l’imagination de la lave
d’être son serf là où elle n’entre
pas à pas ou rien ne se passe
comme au centre d’une petite ville
de province le lendemain d’un mariage
restant dans sa tête à ses pieds
toujours je serai près d’elle comme chair et ongle
dans le temps géologique du monde
sans différence encore entre père et mère
où finalement je ne deviens
plus qu’un écho d’une pensée en vers
n’écoutant aucun reproche d’ami ni d’oncle
pas plus d’un frère
ennemi sa poitrine rouge affublée d’un trou
iv
grimpons plutôt jusqu’au bord de ce trou
perché sur le cercueil de ma tante
je dévisage enfin mon semblable mon frère
qui squatte à son tour son propre salon
et jamais sœur de mon oncle
ne jettera plus son ombre sur son contenu
de son côté son regard est fixé vers
l’horizon qui lui aussi repart
au point focalisé sur justement ce que je deviens
je n’aimerai tant ou plus par mon âme
un autre moi sorti d’une autre mère
qui se promène sans but dans son jardin
dans le temps géologique du monde
un moi rien d’autre qu’une sorte de récipient
aussi proche qu’est le doigt de l’ongle
ou la narine droite du doigt
ou la table basse des pieds
ou le chrétien pénible de la pierre
ou l’ennui du mariage
s’il lui plaisait je voudrais être de sa chambre
avec sa vue le soir sur la ville
illuminée dans toute l’inévitabilité de sa prose
et une lune sous laquelle rien de neuf ne se passe
dans une telle demeure
il peut faire de moi l’amour qui dans mon cœur entre
sur l’espace vierge du texte humain
avec toute la lente détermination de la lave
sans faire de nous la moindre fille ni le moindre fils
sans remplir la moindre salle de cours
à son gré comme homme fort de faible moi verge
comme un cuistot épluche un légume
ou un chasseur dépèce un corps
v
mais si on changeait à nouveau de corps
afin de regarder du fond d’un autre trou
comme partant des racines d’un légume
nourri de la chair et des os de ma tante
depuis qu’a fleuri la sèche verge
je me vois comme un frère
pensant plus à ses charges qu’à ses cours
comme un client de bordel dans le salon
ému profondément par tous ces fils
que du seigneur Adam sont nés neveux et oncles
la sève me montant comme de la lave
sans que je puisse normalement déverser son contenu
sur l’espace vierge du texte humain
je ferme mes yeux donc et me retourne vers
un amour comme celui qui dans mon cœur entre
venu d’un nuage on dirait quelque part
vague la très céleste demeure
de ce que j’ai été et de ce que je deviens
où plus rien ne se passe
je ne crois qu’il a été en corps ni âme
un plus beau usage de la prose
que de narrer cette naissance d’une mère
plus vierge de sens encore que cette ville
ou de la vraie nature sauvage qu’un jardin
où qu’elle soit sur la place ou dans la chambre
dans le temps géologique du monde
nos esprits forment un parfait mariage
moi le puits le récipient
elle la main qui laisse tomber la pierre
mon cœur sera moins loin que l’épaisseur d’un ongle
nos pieds toucheront tout simplement nos pieds
alors que le vide tourne autour de mon doigt
vi
enfin quand est-ce qu’on mettra justement le doigt
sur le point précis de ce caméléon de corps
depuis les racines jumelles des pieds
en remontant en faisant le tour de chaque trou
qu’ainsi s’enracine devienne ongle
comme pousse si doucement chaque légume
comme s’accumule plus longuement chaque pierre
comme jolie jeune femme se termine en vieille tante
localisant enfin la partie plus qu’imaginaire de ce récipient
mon cœur en elle comme écorce en la verge
ou amour et sexe se prennent en mariage
se regardant longuement comme sœur et frère
dans le temps géologique du monde
la personne aimée et moi non plus à part dans nos cours
elle m’est de joie tour et palais et chambre
je suis son délice comme cuisine salle de bain et salon
et pendant ce temps-là dans le jardin
jouent nos filles et nos fils
aussi réels ou imaginaires que cette ville
je n’aime tant frère parent ni oncle
ni même mon propre père ni mère
ni la fraîcheur d’un ru de montagne ni de la lave
ni la simplicité de la poésie ni la prise de tête de la prose
dans toute la splendeur ou la banalité de son contenu
en paradis aura double joie mon âme
sur l’espace vierge du texte humain
là où toujours enfin tout se passe
en allant constamment vers
ce que j’ai été ce que je suis et ce que je deviens
si jamais homme d’avoir aimé y entre
ce palais deviendra sa demeure
sans aucun besoin d’un nouveau départ
Tornada
Ian propose son chant et puis le découpant Arnaut envoie sa chanson de frère de mère de fils de tante d’oncle et d’ongle de doigt de pieds de vers et de prose
dans le temps géologique du monde
pour plaire à celle qui de sa verge son trou son récipient son contenu et son mariage a l’âme le corps le légume la pierre et la lave
sur l’espace vierge du texte humain
son Désiré son prix entre puis repart et demeure puis passe puis vient en sa ville et ses cours puis son jardin puis son salon et sa chambre