Je voudrais maintenant revenir sur une idée, actuellement à la mode, mais que je ne partage pas, à savoir que la poésie serait intraduisible. Quand je lis un poème en traduction, je ne me soucie pas de savoir si, dans sa langue originelle, ce poème est un chef-d’œuvre. S’il m’apporte de grandes émotions, je ne peux pas croire que les qualités que j’y trouve sont dues à la traduction sans être dans l’original.
Ce qui ne passe pas dans la traduction, ce sont des qualités techniques. Ainsi un vers tel que : « Le jour n’est pas plus pur que le fond de mon cœur. » n’est pas traduisible. Mais je ne vois pas pourquoi ce que dit Racine des passions ne passerait pas dans une autre langue. Quand je lis Hamlet ou Macbeth, je ressens de réelles émotions, c’est bien que ces textes valent quelque chose poétiquement, même en traduction. Cette idée que la poésie serait absolument intraduisible me semble donc révéler une absence de sensibilité à ce qu’est la véritable poésie.
Je regrette bien sûr ce qu’on perd à la traduction, mais je regrette aussi de ne pas avoir vécu du temps de Froissart. Je lis avec plaisir les quelques poèmes étrangers que Le Monde publie régulièrement dans ses pages littéraires ; ils me permettent d’avoir un peu plus confiance dans l’humanité. Je lis aussi les poètes français dont les neuf dixièmes sont certes assez anodins et seront sans doute vite oubliés, mais qui forment un humus sur lequel un jour peut-être pousseront quelques fleurs.
Dans le même ordre d’idées, je m’aperçois, dans le domaine de la musique, que l’on attache énormément d’importance à la qualité des instruments et à l’impeccabilité de l’exécution. Mais après tout je préfère entendre l’adagio du Quintette pour deux violoncelles de Schubert joué avec quelques fausses notes plutôt que tel morceau que je n’aime pas admirablement joué. De sorte que je pense qu’il y a une certaine « perversité » à s’intéresser à ce qui est secondaire, tertiaire ou quaternaire en passant sur ce qui est primaire.
Parmi les œuvres que je peux relire sans lassitude, je pourrais encore citer l’Explication des métaphores, de Queneau. C’est un des plus beaux poèmes de toute la littérature mondiale
Ce qui ne passe pas dans la traduction, ce sont des qualités techniques. Ainsi un vers tel que : « Le jour n’est pas plus pur que le fond de mon cœur. » n’est pas traduisible. Mais je ne vois pas pourquoi ce que dit Racine des passions ne passerait pas dans une autre langue. Quand je lis Hamlet ou Macbeth, je ressens de réelles émotions, c’est bien que ces textes valent quelque chose poétiquement, même en traduction. Cette idée que la poésie serait absolument intraduisible me semble donc révéler une absence de sensibilité à ce qu’est la véritable poésie.
Je regrette bien sûr ce qu’on perd à la traduction, mais je regrette aussi de ne pas avoir vécu du temps de Froissart. Je lis avec plaisir les quelques poèmes étrangers que Le Monde publie régulièrement dans ses pages littéraires ; ils me permettent d’avoir un peu plus confiance dans l’humanité. Je lis aussi les poètes français dont les neuf dixièmes sont certes assez anodins et seront sans doute vite oubliés, mais qui forment un humus sur lequel un jour peut-être pousseront quelques fleurs.
Dans le même ordre d’idées, je m’aperçois, dans le domaine de la musique, que l’on attache énormément d’importance à la qualité des instruments et à l’impeccabilité de l’exécution. Mais après tout je préfère entendre l’adagio du Quintette pour deux violoncelles de Schubert joué avec quelques fausses notes plutôt que tel morceau que je n’aime pas admirablement joué. De sorte que je pense qu’il y a une certaine « perversité » à s’intéresser à ce qui est secondaire, tertiaire ou quaternaire en passant sur ce qui est primaire.
Parmi les œuvres que je peux relire sans lassitude, je pourrais encore citer l’Explication des métaphores, de Queneau. C’est un des plus beaux poèmes de toute la littérature mondiale