Dans la littérature anglaise, qui a joué un grand rôle dans ma formation, j’ai surtout parlé de poètes comme Shelley, Keats et quelques autres, Swinburne, mais il y a aussi les prosateurs dont, je crois, peu de pays au monde ont l’équivalent. Ils sont uniques dans leur genre. Swift et Sterne par exemple : je n’ai jamais lu un ouvrage qui soit comparable aux Instructions aux domestiques où Swift recommande de cracher dans le potage avant de le servir, etc., enfin, des positions qu’on ne trouve pas ailleurs, même dans la littérature française où je connais assez bien les poètes mineurs. Et la Vie et opinions de Tristam Shandy n’a pas son équivalent ! On l’a imité depuis. Sterne est le premier à avoir mis dans son livre des pages blanches sur lesquelles le lecteur peut écrire quelque chose. Je ne trouve pas d’équivalent à la prose anglaise qui m’ait impressionné dans les autres littératures… On a peut-être un peu cela dans la littérature japonaise ou la chinoise. Il y a des textes du bonze Kennko très mordants. C’est une sorte de Montaigne japonais.
Parmi les livres qui m’ont enchanté en leur temps, il y a aussi un livre beaucoup plus récent : Le nommé Jeudi de Chesterton. C’est un roman absolument parfait – peut-être un peu passé maintenant ! Mais je crois que je le relirais avec plaisir. C’est un livre qui va jusqu’au bout de sa trajectoire.
Il m’est arrivé quelquefois de relire des textes qui m’avaient laissé un grand souvenir et d’être infiniment déçu. D’autres au contraire me procurent toujours le même plaisir : je peux reprendre Rabelais, ça rend toujours à cent pour cent. Je vous ai parlé d’un poème de Thompson sur un flocon de neige : j’hésite à le regarder. J’ai peur de ne pas y retrouver le même plaisir et j’aime mieux le laisser. Pour moi, il y a les flocons de neige que je connaissais avant Thompson et les flocons de neige après ce poème. Je ne voudrais pas les perdre. Il y a, bien entendu, des poètes dont je suis sûr.
J. B. Au fond, qu’attendez-vous de la littérature ?
F. L. L. Il faudrait dire : littérature et poésie. Ce sont deux mots que j’aime bien séparer, quoique la poésie soit un sous-ensemble de l’ensemble littérature, bien entendu. En fait, quand je dis que quelque chose est de la littérature, je veux dire que ce n’est pas de la poésie, ça peut être intéressant quand même.
Parmi les livres qui m’ont enchanté en leur temps, il y a aussi un livre beaucoup plus récent : Le nommé Jeudi de Chesterton. C’est un roman absolument parfait – peut-être un peu passé maintenant ! Mais je crois que je le relirais avec plaisir. C’est un livre qui va jusqu’au bout de sa trajectoire.
Il m’est arrivé quelquefois de relire des textes qui m’avaient laissé un grand souvenir et d’être infiniment déçu. D’autres au contraire me procurent toujours le même plaisir : je peux reprendre Rabelais, ça rend toujours à cent pour cent. Je vous ai parlé d’un poème de Thompson sur un flocon de neige : j’hésite à le regarder. J’ai peur de ne pas y retrouver le même plaisir et j’aime mieux le laisser. Pour moi, il y a les flocons de neige que je connaissais avant Thompson et les flocons de neige après ce poème. Je ne voudrais pas les perdre. Il y a, bien entendu, des poètes dont je suis sûr.
J. B. Au fond, qu’attendez-vous de la littérature ?
F. L. L. Il faudrait dire : littérature et poésie. Ce sont deux mots que j’aime bien séparer, quoique la poésie soit un sous-ensemble de l’ensemble littérature, bien entendu. En fait, quand je dis que quelque chose est de la littérature, je veux dire que ce n’est pas de la poésie, ça peut être intéressant quand même.
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Voir le chapitre 15.